Si l’invention est européenne (Amsterdam, en 1965), c’est en Chine que les vélos en libre-service sont les plus nombreux. Mais 800 000 vélos pour 1,4 milliard d’habitants, «c’est peanuts».

Depuis des années, à Shanghai, Pékin ou Shenzhen, il m’arrivait de tomber par hasard sur une station de vélo en libre-service, souvent dans les lieux stratégiques, comme les gares, les centres-villes, les squares, etc.). Bref, un peu comme chez nous.

En 2016, la ville de Shenzhen qui avait interdit les 2-roues à moteur thermique, il y a des années et pour cause de pollution, décide cette fois d’interdire les 2-roues électriques! C’est logique puisque les vélos électriques fonctionnent, selon le mix électrique chinois 2015, à 64% au charbon...

Ils sont partout!

Je n’avais pas encore mesuré la réaction entrepreneuriale à cette action politique. Le 12 décembre 2016, en traînant ma valise dans les rues de la ville de Kunming jusqu’à l’arrêt de la navette d’aéroport, je croise un drôle de vélo sans chaîne, au design épuré et marqué «Mobike». Sa 
conception semblait incroyablement solide et intégrée, même son cadenas. Ne m’attardant pas, je m’envole pour la Suisse.

Retour en Chine le 4 février 2017, à 14 heures. Surprise lorsque je prends la navette d’aéroport pour rentrer chez moi, les Mobike sont partout sur mon chemin, tels les jouets éparpillés d’une garderie. En voyant des quidams scanner un code avec leur smartphone, je devine que tous ces vélos sont en libre-service. Confirmation en lisant le tarif sur la selle: 
«半小时1元», 1 yuan la demi-heure, soit 15 centimes. Cool, je télécharge illico l’appli et d’un clic de Wechat, je vire les 300 yuans de dépôt à l’inscription – le processus est validé en 24 heures afin que la compagnie vérifie le selfie de la personne avec sa carte d’identité ou passeport envoyé. Très pratique, très sérieux!

De porte à porte

Alors que l’idée de louer un vélo ne m’a jamais traversé la tête jusqu’ici – rien que chercher la station de départ et d’arrivée étouffe en moi la moindre velléité –, j’ai immédiatement adopté le concept chinois. On prend un vélo n’importe où, en scannant le code QR, le cadenas s’ouvrant automatiquement, puis on le dépose à destination, n’importe où en le verrouillant manuellement (un bip du vélo et de l’appli confirment la fin de location). Mieux, l’appli indique, sur une carte, où se trouvent tous les vélos à proximité, on peut donc même les prendre ou les laisser dans une cour d’immeuble. L’appli offre également quelques fonctionnalités intéressantes comme la distance parcourue, les calories brûlées, le trajet (tous mémorisés dans l’historique) et bien sûr le solde. On peut aussi indiquer sa destination et l’appli joue alors les GPS ou encore appeler l’assistance en cas de problème technique ou d’accident. Du crédit est donné à ceux qui photographient les dysfonctionnements sur le vélo loué, les abuseurs seront vite repérés.

Un succès… pour les gagnants

Comme toujours en Chine, lorsqu’une idée remporte un succès, la concurrence s’engouffre dans la brèche à la vitesse d’un typhon. Des dizaines d’entreprises ont tenté leur chance, les perdants étant rapidement balayés. Aujourd’hui Mobike, Hello Bike, Ofo et DD Bike dominent le marché, chacun avec un positionnement spécifique: low-cost, pratique, trendy, etc.

Le fait de pouvoir prendre, 24 heures sur 24, un vélo n’importe où dans la rue (la nuit, une fonction torche facilite le scan) pour aller au resto, au shopping, chez des amis ou simplement rentrer chez soi, donne un 
nouveau souffle au vélo-partage. Le concept a déjà envahi des centaines de métropoles chinoises, au bénéfice de l’environnement, de la santé et de la mobilité.Jean-Luc Adam

correspondant du JAM en Chine